Affirmer un droit universel et intégral à la compensation des conséquences d’une situation de handicap quel que soit l’âge, décliner des réponses opérationnelles pour la refonte de la gouvernance du système et assurer un financement pérenne de ce 5eme risque Autonomie, à la veille de l’accélération de la transition démographique à horizon 2030, le collectif aimerait vos réponses à ces questions pour mars 2022 en vue d’une conférence de presse.
Pour la fin de la barrière de l’âge
De plus en plus de personnes atteignent des âges élevés. Etant donné les liens qui existent entre problèmes de santé entrainant un besoin d’aide à l’autonomie et avancée en âge, la population qui vit une situation de handicap et a des besoins de compensation, est majoritairement très âgée.
>> Comptez-vous remédier à cette discrimination selon l’âge par un droit de compensation et une prestation Autonomie identiques pour un même besoin d’aides dans les activités de la vie quotidienne, quel que soit l’âge ?
Pour un 5eme risque Autonomie financé
Forts restes à vivre/à charge des personnes directement concernées, de leurs proches, aides individuelles et collectives confiées à une gouvernance complexe,
Les sommes à la charge des personnes âgées en établissement ou à domicile sont très au-dessus de la moyenne des pensions de retraite.
>> Vous engagez-vous à financer lors du prochain quinquennat la 5eme branche de protection sociale dite « Autonomie » votée en 2020 visant à compenser les conséquences d’une situation de handicap quelle qu’en soit l’origine (situation de handicap ou avancée en âge) ?
Avec un financement principalement basé sur la Solidarité Nationale ?
Pour un parcours d’aides et de soin lisible et simple
La responsabilité de l’organisation et du financement des services et institutions d’aide et soin aux plus âgés en situation de vulnérabilité est éclatée entre différentes autorités tant au niveau central (CNSA, administrations ministérielles des secteurs de la santé, des affaires sociales, du logement etc.) que local (Agences régionales de santé, conseils départementaux, municipalités, associations etc.). La fragmentation concerne la législation et la réglementation générale, l’autorisation des nouveaux services et personnels, la détermination des tarifs pour les prestations, l’allocation des budgets aux organismes prestataires. S’ajoutent en outre les actions sociales facultatives des municipalités et des caisses de Sécurité sociale. La fragmentation concerne également la fourniture des prestations, les rendant peu lisibles pour les personnes concernées, leurs proches aidants et les nombreux intervenants de terrain. Les prestataires sont de statut varié (publics, associatif, privés lucratif, professionnel libéral), de formation et de qualification diverses (profession sanitaire, profession sociales, emplois non qualifiés, proches aidants)[1]. Cette multiplicité s’explique par la dichotomie entre secteur sanitaire et social, entre professionnels de ville et établissements sanitaires et médico-sociaux. Le manque de coordination entre acteurs génère des ruptures de continuité des parcours d’aide et de soin au long cours, notamment en cas d'hospitalisation pour un épisode aigu. La fragmentation contribue, en outre, à la concurrence entre responsables, dans un contexte de financements limités, pour obtenir des moyens supplémentaires. Il en résulte des déséquilibres de moyens entre territoires et entre secteurs notamment aux dépens du médico-social par rapport au sanitaire et au sein du secteur médico-social aux dépens de l’aide à domicile, pourtant plébiscitée par les français pour vieillir chez soi.
[1] N’y a-t-il pas six possibilités de recevoir une aide pour la toilette sans qu’il y ait un lien évident entre qualification de l’intervenant et reste à charge pour la personne aidée.
>> Comment comptez-vous y remédier ? Qui selon vous doit être leader pour l’allocation des ressources ? Comment inciter à la coordination des prestaires ? Comment assurer un meilleur équilibre de moyens entre les différents secteurs ?
Lutter contre la maltraitance
Toutes les maltraitances doivent être dénoncées et la protection des lanceurs d'alerte garantie.
En France, 5% des personnes de plus de 65 ans et 15% des plus de 75 ans, soit 600 000 personnes en tout, subiraient une forme de maltraitance
>> Etes-vous prêt à vous attaquer au problème et à promulguer les textes correspondants (la maltraitance ne figure pas en tant que telle dans le Code pénal) ?
Pour une refonte et une professionnalisation de la filière médico-sociale
Le nombre, la qualification, les compétences des personnels en établissements et à domicile sont insuffisantes étant donné l’accroissement du nombre de personnes du grand âge en situation de handicap complexe car atteintes de multiples problèmes de santé et maladies. Elles nécessitent des intervenants formés à une approche globale de la santé, au travail en équipe et à une coordination entre professionnels pour assurer des réponses adéquates tout au long du parcours d’aide et de soins.
La formation devrait s’appuyer sur la conception capacitaire de la santé au sens OMS d’un état de complet bien-être physique, mental et social qui ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d'infirmité. Des réponses variées, connues, financées, attractives seront des ressources, des centres de prévention, de compensation, de soutien moteurs, innovants, validés, avec un personnel formé, compétent en nombre suffisant.
- L’effectif global des intervenants au domicile des particuliers est estimé à 1,23 million.
- D’ici à 2030, 300 000 emplois nouveaux auprès des personnes âgées seront à pouvoir.
- Les conclusions du rapport Dufeu Schubert de 2019 contre l’âgisme demandent de faciliter l’inclusion des seniors dans la société en leur donnant plus de moyens pour rester autonomes et notamment de rénover les grilles dévaluation (Aggir), miser sur les compétences des citoyens de tous les âges, en entreprises, déployer l’approche domiciliaire.
>> Quelles solutions envisagez-vous pour créer, financer et rendre attractive une véritable filière médico-sociale professionnelle, en établissements comme à domicile ? Comment comptez-vous renforcer les effectifs ?
Pour soutenir les proches aidants en souffrance
Les proches aidants représentent l’essentiel de l’aide apportée aux personnes âgées ou handicapées (notamment jeunes). Leur aide commence tout juste à être reconnue comme une activité ouvrant des droits sociaux.
Or les aidants sont majoritairement des femmes avec des parcours professionnels discontinus et des pensions de retraite faibles.
Par ailleurs, nombre d’entre eux s’épuisent. Un dispositif d'accompagnement des aidants qui fasse porter la charge des soins et de l'accompagnement sur les professionnels est nécessaire alors que nous sommes actuellement dans la situation inverse.
- Pour les personnes âgées en situations de handicap les plus importantes, l’aide informelle (proches aidants) se monte à 5h15 en moyenne par jour.
- Cet accompagnement informel représente 7 à 11 milliards par an.
- La loi d’adaptation de la société au vieillissement suivi de la stratégie pour les aidants ont permis des avancées encore insuffisantes :
- Apa 2 (à domicile)
- Droit au répit (500 euros par an pour les situations les plus complexes
- Reconnaissance du statut d’aidant
- Rémunération du projet proche aidant en 2021
>> Quel engagement prenez-vous face à ces réalités ? Comment ?
Lutter contre l’âgisme, cette discrimination liée à l’âge
Les conclusions du rapport Dufeu-Schubert de 2019 estiment que pour mettre fin à l’âgisme délétère qui rejaillit sur TOUTES les générations*, il s’agit de :
- développer une société inclusive qui s’appuie sur l’éducation et les médias pour développer une culture de la longévité positive
- Instaurer des droits et libertés fondamentales en faveur des personnes âgées et de la préservation de l’autonomie
- Faciliter l’inclusion des seniors dans la société en leur donnant plus de moyens pour rester autonomes
*Cette discrimination a des impacts médico-économiques : « Les personnes âgées ayant une attitude négative vis-à-vis de leur propre vieillissement ne se rétablissent pas aussi bien des incapacités et vivent en moyenne 7,5 années de moins que celles ayant une attitude positive ».
La « barrière d’âge des 60 ans » (APA/PCH) limite l’accès aux soins et à l’autonomie.
>> Quelles mesures envisagez-vous pour que la lutte contre l’âgisme soit reconnue au même titre que la lutte contre le sexisme, le racisme ou toute autre discrimination ?
Sources
Rapport de la concertation Grand âge et autonomie - Rapport Libault : 175 propositions pour une politique nouvelle et forte du grand âge en France, mars 2019
https://solidarites-sante.gouv.fr/archives/consultation-place-des-personnes-agees/concertation-grand-age-et-autonomie/article/rapport-de-la-concertation-grand-age-et-autonomie
Rapport El Khomri : plan de mobilisation nationale en faveur de l’attractivité des métiers du grand-âge ,octobre 2019
https://solidarites-sante.gouv.fr/ministere/documentation-et-publications-officielles/rapports/personnes-agees/article/rapport-el-khomri-plan-de-mobilisation-nationale-en-faveur-de-l-attractivite
Réussir la transition démographique et lutter contre l’âgisme. Rapport réalisé par Mme Audrey Dufeu Schubert, députée de Loire-Atlantique, à la demande d’Edouard Philippe, Premier ministre, décembre 2019
https://solidarites-sante.gouv.fr/ministere/documentation-et-publications-officielles/rapports/personnes-agees/article/reussir-la-transition-demographique-et-lutter-contre-l-agisme
Observatoire de l’âgisme
http://agisme.fr/
Note du CAE : quelles politiques publiques pour la dépendance ? Antoine Bozio, Agnès Gramain et Cécile Martin, octobre 2016
http://www.cae-eco.fr/Quelles-politiques-publiques-pour-la-dependance.html
Les services à la personne en 2015
http://dares.travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/2017-011.pdf
Agevillagepro : interview de Philippe Bielec, ingénieur conseil à la direction des risques professionnels à la Cnamts
Quel est l’impact de la survenue d’un accident du travail sur la santé et le parcours professionnel ? Ben Halima M.-A., Regaert C. (Irdes) Document de travail n° 68. 2015/09
Alma France : fédération 3977 de lutte contre la maltraitance des aînés
Signataires de l'interpellation
- Jacqueline CHAPUIS, présidente, Association ALERTES 38.
- Jacqueline GAUSSENS, gérontologue.
- Florence LEDUC, Présidente de l’Observatoire de l’âgisme.
- Pascale RIBES, présidente d’APF France handicap.
- Annie de VIVIE, fondatrice d’Agevillage.com, coordinatrice des formations Humanitude vers le label Humanitude, Observatoire de l’âgisme et Journée nationale des aidants (6 octobre).
- Pascal CHAMPVERT, président de l’AD-PA, Association des directeurs au service des personnes âgées
- Didier DUPLAN, retraité du secteur médico-social
- Jean-Claude HENRARD, professeur émérite de santé publique, gérontologue.
- Jérôme PELLISSIER, écrivain, chercheur en psychologie, Observatoire de l’âgisme : http://agisme.fr/
- Yves VEROLLET, syndicaliste
Contacts : Annie de Vivie, Agevillage/Humanitude : anniedevivie@agevillage.com / Romain Gizolme, AD-PA : rg.ad-pa@orange.fr